Gabriella Boyd, Beloved Axis at Espace Niemeyer
October 12, 2024–October 19, 2024

Woodworm
Thomas McMullan

It got to the point where I almost wanted it to happen. The apartment was riddled with these little holes, sometimes I thought that if it wasn’t for the furniture, Jesus, I'd have nothing to hold onto.

Before that November, I hadn’t seen my neighbour in months. Shameful. I took on the caring responsibilities because her family had left her high and dry. The building was near the river. I’d take my time washing her hair, massaging her scalp, running the tips of my fingers to the back of her head. One day, on the street not far from our place, I saw a man holding what I first thought was a torn latex glove. The kind you’d get in a hospital. He was waving it around in the air, and then I saw that it wasn’t a glove at all. You could see the bones in his arm.

My neighbour has this way of making everyone else in a room feel her mood. I think it’s something she does with her breathing. She slows it down, puts the whole of herself into it. I can’t help but feel what she’s feeling. I tidied up the place, threw away the old post, got someone in for the woodworm but there was nothing to be done about the floorboards. Structurally unsound. My neighbour got worse and I braced myself for what I might wake up to.

When me and my sister were girls, we’d share a bunk bed, and because she was older she’d have the top. I’d look up at the wooden slats and think about her body there, growing, having its own thoughts. Little holes in the wood, or maybe I’m misremembering. In any case, I used to think about what it would be like if it snapped, if she fell right on top of me.

There were long stretches of time when I felt like I was the only person in the apartment. I’d sit in my neighbour’s armchair and I’d forget that it didn’t belong to me. She got worse, became harder to read. This was around the time we started sleeping in the same room. I’d listen to her breathing and match it with my own. I found an empty chrysalis on her windowsill. Finespun and see-through. There was a storm and it blew down a tree. After that, I spent whole days in her armchair, the nights alone in her bed. I didn’t like moving between one and the other, the floorboards would creak more and more and I knew it was only a matter of time before the whole place would fall apart.

In her bed, I’d look up at the ceiling and focus on my breathing. Something was growing. I’d try not to think about bad things. Instead, I’d concentrate on whatever emotion was in the room. One of us was living inside the other. Perhaps it was both of us, living inside the other. There wasn’t much I could say, it was going to happen one way or another.

Micki Meng presents an off-site exhibition of works by Gabriella Boyd at Espace Niemeyer, Paris.

Ver à bois
Thomas McMullan

C’en était arrivé au point où je voulais presque que cela arrive. L’appartement était criblé de petits trous. Je me disais parfois que s’il n’y avait pas eu les meubles, bon sang, je n’aurais rien eu à quoi me raccrocher.

Avant ce mois de novembre, cela faisait des mois que je n’avais pas vu ma voisine. Honteux. Je m’occupais d’elle, car sa famille l’avait tout bonnement laissée tomber. L’immeuble était près de la rivière. Je prenais le temps de lui laver les cheveux et de lui masser le cuir chevelu en promenant le bout de mes doigts jusqu’à sa nuque. Un jour, dans la rue près de chez nous, j’ai vu un homme qui tenait à la main ce que j’ai d’abord pris pour un gant en latex déchiré. Le genre de gant qu’on trouve dans les hôpitaux. Il l’agitait dans les airs et j’ai remarqué que ce n’était pas un gant. On pouvait voir les os de son bras.

Ma voisine arrive à faire ressentir son humeur aux personnes qui se tiennent dans la même pièce qu’elle. Je crois que ça a à voir avec sa respiration. Elle la ralentit et y met toute son énergie. Je ne peux m’empêcher de ressentir ce qu’elle ressent. J’ai rangé l’appartement, jeté le vieux courrier, fait venir quelqu’un pour les vers à bois, mais il n’y avait plus rien à faire pour le parquet. Sa structure était altérée. L’état de ma voisine s’est empiré et je me préparais chaque matin à ce que j’allais découvrir au réveil.

Quand moi et ma sœur étions petites, nous dormions dans des lits superposés et comme elle était plus âgée, elle occupait celui du dessus. Je regardais les lattes de bois et j’imaginais son corps au-dessus de moi qui grandissait, animé par des pensées qui lui étaient propres. Des petits trous dans le bois, ou peut-être que mes souvenirs sont inexacts. Quoi qu’il en soit, je pensais à ce qu’il se passerait si les lattes se brisaient et qu’elle tombait sur moi.

Pendant de longs moments, j’avais l’impression d’être seule dans l’appartement. Je m’asseyais dans le fauteuil de ma voisine et j’oubliais qu’il ne m’appartenait pas. Son état s’était aggravé et ses sentiments étaient devenus plus difficiles à lire. C’est à peu près à cette époque que nous avons commencé à dormir dans la même pièce. J’écoutais sa respiration et m’efforçais de l’imiter. J’ai trouvé une chrysalide vide sur le rebord de sa fenêtre. Délicate et translucide. Il y a eu une tempête qui a fait tomber un arbre. Après cela, j’ai passé mes journées dans son fauteuil et mes nuits, seule, dans son lit. Je n’aimais pas aller de l’un à l’autre, les lattes du plancher grinçaient de plus en plus et je savais que ce n’était qu’une question de temps avant que tout s’écroule.

Dans son lit, je regardais le plafond et je me focalisais sur ma respiration. Quelque chose grandissait. J’essayais de chasser les pensées négatives. Je me concentrais plutôt sur les émotions présentes dans la pièce. L’une de nous vivait à l’intérieur de l’autre. Peut-être que nous vivions toutes deux l’une à l’intérieur de l’autre. Il n’y avait pas grand-chose à dire, cela allait arriver d’une manière ou d’une autre.